Anticiper l’IA : scénarios de risques et d’opportunités, et comment se préparer concrètement.

de Sven

L’intelligence artificielle n’est plus une promesse futuriste.

En 2024, plus d’un salarié européen sur deux utilise déjà un outil d’IA au travail. Les banques d’affaires estiment que 300 millions d’emplois pourraient être automatisés à moyen terme. Et les data centers qui font tourner ces modèles engloutissent déjà l’équivalent énergétique d’un pays entier (sans parler des dizaines de milliards de litres d’eau).

Alors que certains chercheurs envisagent une “super-intelligence” (forme d’IA qui dépasserait largement les capacités cognitives humaines dans presque tous les domaines) dans la décennie à venir, nous sommes face à un changement de paradigme comparable à l’électricité ou à Internet… Mais peut-être plus profond, car il touche à la cognition elle-même.

Le problème ? Personne ne peut prédire toutes les conséquences d’un tel changement.

Chaque innovation entraîne des boucles de rétroaction que nous ne savons pas anticiper.

Dans cet article, le but n’est pas d’annoncer “le” scénario, mais de mettre sur la table des possibilités (certaines connues, d’autres moins intuitives) pour ouvrir votre horizon sur le champ des « possibles » et, autant que possible, proposer des gestes de préparation concrets adaptés au quotidien.

Carte des dépendances : énergie, eau, calcul, données et régulation

L’intelligence artificielle semble immatérielle, mais elle repose sur des infrastructures très concrètes.

Sans énergie, sans eau, sans puces, sans données et sans cadre légal, elle s’arrête net.

  • Énergie & eau : les data centers engloutissent déjà l’équivalent électrique d’un pays entier et des dizaines de milliards de litres d’eau pour leur refroidissement. Dans certaines régions, cela peut provoquer des tensions locales (réseau saturé, restrictions d’eau). À l’échelle globale, l’effet est moins visible pour l’instant, mais la trajectoire est inquiétante.
  • Puces et puissance de calcul : l’IA moderne dépend de composants très spécialisés (GPU, HBM, etc.), produits par quelques acteurs seulement. Une rupture dans cette chaîne (pénurie, embargo, accident industriel) pourrait ralentir brutalement les progrès… ou réserver la puissance de calcul à une poignée d’acteurs dominants.
  • Données : sans flux massifs d’informations, pas d’IA. Mais une grande partie des contenus disponibles est déjà produite… par l’IA elle-même. Résultat : risque de “pollution” des données (modèles qui réapprennent sur leurs propres sorties, potentiellement erronées), perte de diversité, et dépendance accrue à quelques bases privées.
  • Régulation : l’Europe (AI Act) et les États-Unis (NIST) tentent de mettre des garde-fous. Problème : plus la loi est stricte et coûteuse, plus elle renforce les grands groupes capables de suivre, laissant peu de place aux petits acteurs. Moins de diversité = plus de fragilité.

En résumé, l’IA repose sur des chaînes d’approvisionnement et des ressources (de plus en plus) limitées.

Comprendre ces dépendances, c’est comprendre où se situent les failles… et pourquoi un scénario local (blackout, sécheresse, rupture de puces, censure de données) peut avoir un impact disproportionné.

Six scénarios de risques IA

L’objectif est ici de ne pas faire de blabla mais d’explorer des scénarios possibles liés à l’IA.

A vous d’imaginer le reste !…

1- Chômage de masse et tension sur les systèmes sociaux

L’automatisation par l’IA peut frapper vite, large et de manière inégale.

Les tâches routinières (bureaux, service client, rédaction basique) basculent d’abord, puis des métiers qualifiés voient une partie de leurs missions “assistées” ou remplacées.

Moins d’emplois stables = moins de cotisations = des systèmes sociaux fragilisés.

La boucle possible : pertes d’emploi → baisse des recettes publiques → prestations rognées → tensions et mouvements sociaux.

Ce que vous pouvez faire :

  • Développer une polycompétence “IA + terrain” (compétences numériques utiles + savoir-faire concrets).
  • Diversifier vos revenus (indépendant, micro-prestations, ventes locales, compétences manuelles).
  • Réduire vos charges fixes (frugalité), constituer un matelas de sécurité.

2 – Désinformation de masse et polarisation sociale

Des IA peuvent inonder l’espace public de contenus plausibles, mais faux.

Deepfakes, vidéos IA, faux témoignages, micro-ciblage émotionnel : l’objectif n’est pas d’être cru par tous, mais de semer le doute chez chacun.

La perte de confiance générale est un risque politique majeur.

La boucle possible : désinfo → méfiance → tribalisme → violence verbale puis physique.

Ce que vous pouvez faire :

  • Vérifier systématiquement (recherche inversée d’images, sources multiples, date/lieu).
  • Construire des réseaux de confiance locaux (voisins, pros, associations) et des canaux alternatifs.
  • Limiter l’exposition aux flux émotionnels des actus quotidiennes, préférer des sources d’informations « lentes » (documentaires, livres, études scientifiques…) et fiables.

3 – Cyberattaques massives dopées à l’IA

L’IA abaisse la barrière d’entrée pour les attaquants et accélère les campagnes.

Phishing ultra-ciblé, brute force assisté, automatisation des intrusions : les PME, collectivités, hôpitaux deviennent des cibles faciles.

Une panne numérique bien placée peut paralyser un foyer, un quartier, une ville.

La boucle possible : attaques plus fréquentes → défenses saturées → confiance numérique qui s’érode.

Ce que vous pouvez faire :

  • 2FA partout, gestionnaire de mots de passe, mises à jour régulières.
  • Sauvegardes 3–2–1 (3 copies, 2 supports, 1 offline), documents vitaux imprimés.
  • Plan “mode dégradé” : payer/communiquer/se déplacer sans smartphone ni Internet.

4 – Biohacking domestique et pandémies artificielles

La baisse des coûts en biotechnologique et certaines capacités d’IA peuvent faciliter des expérimentations volontairement dangereuses ou simplement irresponsables.

On pourra bientôt faire des virus DIY dans son garage. Couplé à des risques connus telles que les protéines miroir, le risque devient immense.

… et le plus grand de ces risques, c’est la démocratisation aveugle des moyens.

La boucle possible : incidents → durcissement réglementaire fort → activités clandestines → risques plus opaques.

Ce que vous pouvez faire :

  • Préparer le foyer : hygiène renforcée, pharmacie de base, masques, solution hydroalcoolique, thermomètre.
  • Autonomie courte : stocks alimentaires tournants 2–4 semaines, eau + filtration.

5 – Concentration de pouvoir et dépendance forcée

Accès au calcul, aux données et à la conformité légale : avantage structurel aux géants de la tech.

Quand tout passe par quelques plateformes, le prix, les règles et les coupes de service se décident loin de vous.

Moins d’alternatives = plus de fragilité systémique.

La boucle possible : consolidation → verrouillage → hausse des coûts → exclusion des plus modestes.

Ce que vous pouvez faire :

  • Privilégier des outils interopérables et exportables (formats ouverts dits Opensource, sauvegardes régulières).
  • Tester des solutions locales/offline quand c’est possible (notes, modèles légers, docs).
  • Éviter la dépendance à un seul “fournisseur” pour le travail, la communication et le stockage.

6 – Militarisation et surveillance de masse

L’IA optimise la détection, la reconnaissance, l’anticipation… et parfois la létalité.

Capteurs partout, profilage, notation sociale implicite : le confort peut masquer une extension silencieuse de la surveillance.

Un maillage serré réduit la marge de manœuvre individuelle.

La boucle possible : menace réelle ou perçue → déploiement accéléré → normalisation → dépendance politique à l’outil.

Ce que vous pouvez faire :

  • Hygiène numérique : paramétrer les autorisations, limiter le partage, chiffrer vos sauvegardes.
  • Réduire l’empreinte : payer en espèces quand pertinent, ne pas “tout” tracer.
  • Renforcer l’échelon local : entraide, information de proximité, légalité et bon sens en priorité.

Bonus – IA + ordinateur quantique

Imaginez un ordinateur quantique fonctionnel couplé à une IA avancée : elle pourrait sans problème casser une partie du chiffrement actuel (plus aucun mot de passe ou système de sécurité ne serait efficace, valable pour vous ou pour votre banque) et accélérer certaines optimisations à des niveaux inédits.

Ce scénario n’est pas pour demain matin, mais il mérite une veille sérieuse.

Ce que vous pouvez faire :

  • Mises à jour régulières,
  • Suivi des standards “post-quantum” quand ils deviendront grand public,
  • Sauvegardes offline et d iversification des moyens de paiement et de communication.

Quatre opportunités à saisir : science, météo/climat, productivité, énergie

L’IA n’apporte pas seulement des risques : elle ouvre aussi des leviers puissants.

Bien utilisés, ces outils peuvent renforcer la résilience, améliorer notre quotidien et donner du temps ou des ressources supplémentaires pour mieux se préparer.

1) Science et santé

L’IA accélère déjà la recherche biomédicale.

Exemple concret : AlphaFold 3, capable de prédire la structure et les interactions de protéines complexes, ouvre la voie à des médicaments et traitements plus rapides à concevoir.

Moins d’années de recherche = plus de réactivité face aux crises sanitaires.

Comment en profiter :

  • Suivre les innovations médicales éprouvées (diagnostics plus rapides, outils prédictifs).
  • Ne pas tomber dans le piège des gadgets “IA santé” non validés.
  • Anticiper : stock minimal de pharmacie de base, suivi des alertes officielles.

2) Météo et climat

Des IA comme GraphCast ou GenCast dépassent déjà les modèles météo traditionnels.

Elles prédisent les phénomènes extrêmes (tempêtes, inondations, vagues de chaleur) plus tôt et plus précisément.

Un jour ou deux d’alerte supplémentaire peut sauver des vies et limiter les dégâts.

Comment en profiter :

  • S’abonner aux services météo fiables (app, sites, alertes SMS locales).
  • Intégrer ces alertes dans un plan familial : évacuation, sécurisation des biens, stocks à portée.
  • Pour les cultivateurs : ajuster semis et récoltes en fonction des prévisions longues.

3) Productivité et travail

L’IA libère du temps en absorbant les tâches répétitives.

Études récentes : +14 % de productivité moyenne en support client ou en conseil, avec un impact particulièrement fort pour les profils débutants.

Moins de temps perdu sur le bureaucratique = plus de temps pour bâtir des compétences utiles à la vraie vie.

Comment en profiter :

  • Déléguer les tâches ingrates (reformulations, mails basiques, synthèses).
  • Garder le temps gagné pour développer des savoir-faire concrets (bricolage, autonomie alimentaire, formation).
  • Ne pas se reposer uniquement sur l’IA : la compétence humaine reste votre filet de sécurité.

4) Énergie et optimisation

L’IA aide à mieux contrôler et économiser l’énergie.

Dans les labos, elle sert déjà à stabiliser des plasmas pour la recherche sur la fusion (ce qui déboucherait quasiment sur une énergie gratuite et propre : un bouleversement total de notre monde et de nos sociétés). Plus près de nous et plus immédiat, elle permet d’optimiser la consommation électrique ou la gestion des réseaux.

Chaque kWh économisé est un bout d’autonomie gagné.

Comment en profiter :

  • Installer des solutions domotiques sobres (thermostats, suivi conso, délestage intelligent).
  • Surveiller les outils de micro-réseaux ou de gestion solaire/stockage accessibles au grand public.
  • Ne jamais oublier le mode manuel : toujours prévoir une alternative low-tech en cas de panne.

Ces opportunités ne doivent pas faire oublier les risques… Mais elles rappellent qu’anticiper, ce n’est pas seulement se protéger : c’est aussi tirer intelligemment (et prudemment) parti de ce qui peut renforcer votre autonomie.

Conclusion : élargir le champ des possibles sans paranoïa ni naïveté

L’intelligence artificielle n’est pas un gadget ni une mode : c’est un changement de paradigme.

Comme pour l’électricité ou Internet, il est impossible de prédire toutes les conséquences. Certains scénarios se produiront, d’autres non, et beaucoup seront totalement imprévisibles.

Ce n’est pas une question d’aimer ou pas l’IA. Comme le changement climatique, elle s’impose à nous. Un bon prepper ne se plaint pas si le vent souffle dans une direction : il ajuste ses voiles.

Notre rôle n’est pas d’attendre ni de paniquer, mais d’agir dès maintenant, par petites étapes : frugalité, diversification, low-tech, autonomie locale.

Ces quelques scénarios ne sont que quelques exemples parmi des milliers possibles.

Si vous en voyez d’autres, partagez-les en commentaire : la communauté et l’échange sont nos plus grandes forces.

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